★ Festival du dessin, 1ère édition 2023. Arles fait rayonner joyeusement ce langage artistique universel. Partie 1
Arles est indubitablement une ville qui sait valoriser l’art sous toutes ses formes. Réputée mondialement pour son patrimoine historique remarquable, Arles l’est aussi pour son Festival de la photographie, puis, pour abriter la Fondation Luma. A présent, c’est un nouveau programme culturel qui voit le jour, dont le président d’honneur est Antoine De Caunes. Intitulé « Festival du Dessin », il anime toute la cité antique du 22 avril au 14 mai 2023. Pour l’occasion, ses plus beaux lieux sont mis à contribution afin de célébrer magistralement l’art du dessin. Dans cet article partie 1, découvrez un riche florilège de mes coups de coeur du festival au Museon Arlaten, à la chapelle des Trinitaires, à l’enclos Saint-Césaire, à l’église Saint-Blaise, à la Fondation Van Gogh et à LUMA Les Forges.
40 artistes, plus de 1200 dessins dans 10 lieux emblématiques
Le dessin est un moyen d’expression universel utilisé depuis la nuit des temps à l’instar de nos ancêtres préhistoriques. Le dessin est aussi le premier art de l’enfance. Longtemps déconsidéré au profit de la peinture, il revient en force depuis quelques années dans l’apprentissage des beaux-arts, dans les galeries et les musées. Le « Festival du Dessin » est une initiative de Vera Michalski, présidente du groupe éditorial Libella / fondatrice de la Fondation Jan Michalski, et Frédéric Pajak, dessinateur, écrivain et directeur des éditions Les Cahiers dessinés. Tous deux souhaitent offrir à l’art du dessin une pleine dimension en lui dédiant un festival annuel, à la fois populaire et exigeant. L’objectif est de montrer toutes les facettes de cette discipline en confrontant le dessin d’art, le dessin d’humour, le dessin de presse, le dessin d’art brut et les dessins parallèles, à savoir ceux d’écrivains, de cinéastes ou encore de grandes figures de la mode.
« Festival du Dessin » 1ère édition 2023
Durant 3 semaines, le « Festival du Dessin » propose un riche catalogue de manifestations comprenant des expositions, des projections de films, des concerts, des débats, et des rencontres avec les dessinateurs d’aujourd’hui. Des artistes de tous horizons sont présentés, la plupart consacrés, d’autres oubliés, d’autres encore méconnus. Pour cette première édition, un très bel hommage est rendu à l’un des plus grands dessinateurs de notre époque, Jean-Jacques Sempé (1932 – 2022), à travers deux expositions inédites, l’une à la chapelle du Museon Arlaten et l’autre qui restitue la salle de classe du Petit Nicolas. Ce festival est un vrai coup de coeur, et sans aucun doute qu’il va devenir un évènement annuel incontournable.
⚑ La Chapelle du Museon Arlaten
HOMMAGE À JEAN-JACQUES SEMPÉ (1932-2022)
En 1954, Sempé rencontre René Goscinny, avec lequel il se lie d’amitié et collabore à l’hebdomadaire belge Le Moustique. Deux ans plus tard, il travaille régulièrement pour Paris Match, puis pour Pilote, Punch et Esquire. En 1960, paraît le premier tome du Petit Nicolas, conçu avec son complice Goscinny. Suit en 1962 son premier album personnel « Rien n’est simple » qui précède près de quarante titres où se mêlent humour, poésie et philosophie. Depuis 1978, il a réalisé plus d’une centaine de couvertures pour le New Yorker et travaillé pour de nombreux magazines français (L’Express, Vogue, Télérama, etc.) Exposé dans le monde entier, comptant parmi les plus grands dessinateurs d’humour de notre temps, Jean-Jacques Sempé est mort le 11 août 2022, alors qu’il venait d’achever son dernier livre, Sempé en Amérique.
Commissaires de l’exposition Martine Gossieaux Marc Lecarpentier. Museon Arlaten, 29 Rue de la République.
⚑ Chapelle des Trinitaires : EXPO « ANIMALITÉ »
Olivier Estoppey (1951)
Artiste Suisse maître des œuvres monumentales, Olivier Estoppey propose sur les murs de la chapelle des bâches de plusieurs mètres, offrant un aperçu spectaculaire de sa poursuite inlassable de la figure animale, dont il donne une image à la fois brute, violente et bouleversante.
Commissaire de l’exposition Nicolas Raboud – Chapelle des Trinitaires, 36 rue de la République
⚑ Enclos Saint-Césaire : EXPO « ANIMALITÉ | LE GRAND GALOP »
Joël Person (1962)
Fasciné par les chevaux depuis son enfance, Joël Person n’a cessé d’en explorer la solitude et la sauvagerie, en dessin comme en peinture. Après les avoir représentés dans des boxes d’écurie, il a cherché à les saisir en pleine action sur les champs de course. Il lui a fallu de longs rouleaux de papier pour donner la pleine mesure à leur galop. « Les chevaux de l’apocalypse » et « La déferlante« , deux cavalcades monumentales de 7 et de 9 mètres de long, seront accrochées pour la première fois ensemble, dans l’enclos Saint-Césaire.
Commissaire de l’exposition Frédéric Pajak. Enclos Saint-Césaire, impasse de Mourgues.
⚑ Eglise Saint-Blaise : EXPO « MOLESKINE DETOUR ARLES »
Moleskine présente une sélection de plus de 60 carnets réalisés par des artistes, architectes, réalisateurs, graphistes, illustrateurs, musiciens et écrivains de renommée internationale, provenants de la collection permanente de la Fondation Moleskine. Des carnets réalisés par des artistes présents au Festival et une sélection des carnets prêtés par Les Traces Habiles, l’observatoire des pratiques contemporaines du dessin, complètent l’exposition.
Eglise Saint-Blaise, impasse de Mourgues.
⚑ Fondation Vincent Van Gogh : EXPO « DESSIN À LA MARGE »
En marge de son œuvre littéraire, Victor Hugo a réalisé plus de deux mille dessins, dont une centaine de « Têtes »* surprenantes. En marge de la société, Marcel Bascoulard, clochard virtuose, a croqué les rues de Bourges, tandis qu’Aloïse, fabriquant elle-même ses couleurs quand les crayons lui manquaient, a dessiné en cachette à l’asile où elle était internée. En marge de leur époque, Jean Raine et Pierre Tal Coat ont élaboré une œuvre à nulle autre pareille, superposant leur monde intérieur à la réalité qui les entoure. * Dans les collections de la Bibliothèque nationale de France
Commissaire de l’exposition Nicolas Raboud. Fondation Vincent van Gogh, 35 rue du Dr Fanton.
Marcel Bascoulard (1913-1978)
Adolescent, Marcel assiste au meurtre de son père par sa mère. Très vite, il devient clochard, déambulant dans la ville de Bourges. Durant quarante ans, il dessine les rues sur le vif ainsi que la cathédrale, avec un réalisme virtuose. Autodidacte au talent miraculeux, admiré et réprouvé, asocial et excentrique, il n’hésite pas à s’habiller en femme, dans des robes qu’il confectionne parfois lui-même et dans lesquelles il se fait photographier. Le 12 janvier 1978, il est assassiné dans le terrain vague qui lui sert de domicile. Longtemps méconnue, son œuvre commence enfin à bénéficier de la reconnaissance qu’elle mérite.
Jean Raine (1927-1986)
Il commence à peindre en 1957 et, très vite, expose dans de prestigieuses galeries. De 1966 à 1968, il séjourne à San Francisco où il découvre la peinture acrylique et l’Action Painting, puis s’établit définitivement à Lyon. Sa peinture gestuelle, complexe et troublante, profondément lyrique, constitue un carrefour étonnant entre expressionnisme et psychédélisme hallucinatoire.
Aloïse Corbaz (1886-1964)
Son œuvre haute en couleurs, qu’elle a qualifiée elle-même de « Théâtre de l’Univers », est habitée par la figure idéale du couple, les personnages princiers, les figures politiques comme Napoléon Bonaparte, et les héroïnes historiques telles Marie-Antoinette ou la reine Élisabeth. Aujourd’hui reconnue dans le monde entier, Aloïse compte parmi les références majeures de l’art brut.
Victor Hugo (1802-1885)
Victor Hugo a réalisé près de 4.000 dessins, exclusivement réservés à un usage privé. Caricatures, dessins satiriques, mais aussi vues de monuments, paysages et souvenirs de voyages. Il a eu recours à différentes techniques : mine de plomb, encre, lavis, fusain, pochoirs, papiers découpés, empreintes de dentelle. Rarement montrés de son vivant, ces dessins commencent depuis quelques années à être mis en lumière, à travers des expositions en France et à l’étranger.
Pierre Tal Coat (1905-1985)
Oeuvres gravées à la pointe sèche un merveilleux bestiaire.
⚑ LUMA Les Forges : EXPO « DESSIN PANIQUE ET DESSIN DU TEMPS PRÉSENT »
En 1962, fut fondé en France le mouvement Panique à l’initiative, entre autres, de Roland Topor ainsi que de ses amis Fernando Arrabal, Alejandro Jodorowsky et Olivier O. Olivier. Le Festival du dessin se propose de remettre en lumière deux de ses protagonistes : Topor et Olivier. Ceux-ci, amis des dessinateurs et férus d’art moderne, n’auraient pas boudé leur plaisir en se voyant confrontés à des artistes d’aujourd’hui, témoins et rêveurs. Avec les artistes, Sylvie Fajfrowska, Émilienne Farny, Claire Forgeot, Nadine de Koenigswarter, Martial Leiter, Guy Oberson, Olivier O. Olivier, Alexandra Roussopoulos, Pavel Schmidt, Roland Topor, Corinne Veret Collin. Commissaire de l’exposition Pavel Schmidt.
Corinne Veret Collin (1956)
Découpes, broderies, silhouettes, volumes, ombres portées, collages et fil de fer accompagnent le crayon et les encres dans ses dessins. Les corps entrent dans les corps, des fragments s’en détachent, les mains agitent des théâtres d’ombres, les mangroves enserrent des éléphants ou des baleines, la vie s’enracine dans l’humus de la terre… Tout un univers foisonnant, peuplé de personnages, d’animaux et de symboles, incarne un voyage intérieur transformé en aventure dessinée.
Guy Oberson (1960)
À partir de l’an 2000, Guy Oberson se consacre entièrement à son activité artistique, avec une prédilection pour la pierre noire qui devient emblématique de son œuvre. Il est sensible aux transformations climatiques et à leurs interactions avec l’économie et la politique…
Claire Forgeot (1956)
En 1994, Claire Forgeot décide de se consacrer pleinement à la peinture, à la sculpture et au dessin. Le papier est le support premier de son œuvre élaborée autour de la couleur et du signe, d’une grande délicatesse. Ses dessins d’arbres et de plantes sont autant de voyages poétiques à l’intérieur du paysage même.
Nadine de Koenigswarter (1959)
Inspirée par le jazz, les rythmes africains et les problématiques de l’introspection, Nadine de Koenigswarter élabore en continu une œuvre faite de séries parallèles où le dessin, apparaissant sous une forme tantôt abstraite, tantôt quasi documentaire, tantôt d’un onirisme confinant à la transe, permet d’établir des résonances intimes entre la photographie, la vidéo et les arts plastiques.
Martial Leiter (1952)
Il réalise une œuvre à l’encre de Chine et au lavis où le paysage et le monde des insectes sont transfigurés dans un lyrisme majestueux, comme ici la mouche.
Olivier O. Olivier (1931-2011)
Peintre et dessinateur à l’onirisme aussi inspiré qu’insolite, Olivier O. Olivier a l’art d’infliger au monde et aux êtres les distorsions les plus extravagantes, qui semblent cependant parfaitement naturelles.
Roland Topor (1938 – 1997)
À vingt ans, Roland Topor publie son premier dessin de presse, puis collabore à Hara-Kiri avant de délaisser le dessin d’humour pour se consacrer à un art total en cofondant le groupe Panique. Parolier, nouvelliste, romancier, illustrateur et affichiste prolifique, il met également son talent au service du cinéma, participant, entre autres, au Casanova de Fellini, ainsi qu’au Marquis d’Henri Xhonneux. En 1970, il reçoit le prix des Deux Magots pour sa pièce-roman Joko fête son anniversaire et, trois ans plus tard, le prix spécial du jury à Cannes pour le film d’animation La Planète sauvage de René Laloux, dont il a conçu les dialogues et les dessins. Toujours avec Henri Xhonneux, il crée en 1983 le programme télévisé Téléchat qui connaît un succès étourdissant. En 1990, il est lauréat du Grand Prix de la Ville de Paris. Après sa mort en 1997, il est admis au Collège de ’Pataphysique à titre posthume. Aujourd’hui encore, il reste l’un des grands explorateurs graphiques du corps malmené, des tourments de l’éros et des méandres de l’inconscient.
Pavel Schmidt (1956)
Textes descriptifs issus du catalogue du Festival du dessin. Photos BestArchiDesign
Infos : festivaldudessin.fr – Instagram – Catalogue du festival du dessin, Les Cahiers Dessinés
Quand : Du 22 avril au 14 mai 2023
Tarif : Billetterie principale et boutique, place de la République. Tous les jours sauf le lundi De 10h à 18h