★ Kolektiv 313 à la Cité Radieuse Le Corbusier expose l’artiste activiste contemporain tchèque, Jan Šrámek
Du 6 avril au 15 mai 2024, à Marseille au sein de l’unité d’habitation Le Corbusier, Kolektiv Cité Radieuse à la joie d’accueillir le travail de l’un des principaux illustrateurs tchèques contemporains, Jan Šrámek. Parmi une sélection d’illustrations de l’artiste, l’exposition « Endangered especies » (Espèces menacées) témoigne de la richesse architecturale moderne tchécoslovaque de 1958 à 1989, et de sa fragilité, face à sa disparition progressive. Depuis 2010, Jan Sramek, qui se définit comme un graphiste activiste, contribue à la préservation et attire l’attention sur l’architecture brutaliste de la République tchèque. S’exprimant sur de multiples supports (bandes dessinées, livres primés, illustrations pour la presse, ou encore en vidéo), il a créé un univers visuel fort, tout en étant ludique et légèrement dystopique. Jan Sramek parvient ainsi à susciter un rapport émotionnel avec une architecture contestée et trop souvent négligée. Comme ailleurs, les bâtiments brutalistes de son pays d’origine sont menacés, voire appartiennent déjà au passé.
Témoignage de Jan Šrámek pour la Cité Radieuse Le Corbusier
Spécialement pour l’exposition, en collaboration avec Kolektiv Cité Radieuse, Jan Šrámek a interprété l’emblématique unité d’habitation marseillaise, avec une série très limitée, signée et numérotée, de trois illustrations sur impression riso.
Exposition de Jan Šrámek « Endangered Species »
Unclaimed brutalism heritage 1958 – 1989
À l’âge de l’anthropocène les espèces menacées sont légion. Cette perte de biodiversité qui affecte l’ensemble du vivant et condamne des écosystèmes entiers, est le produit de dynamiques amorcées dès le début de la révolution industrielle, et renforcées par des logiques de prédation associées à l’expansion du capitalisme financier et à l’ère coloniale. Mais ce mouvement d’expansion destructeur qui caractérise les rapports des humains à leur environnement, trouve son pendant au sein même des écosystèmes urbains.
Hommage à un patrimoine architectural tchécoslovaque menacé ou déjà disparu
À travers l’exposition « Endangered Species » l’artiste visuel et illustrateur Jan Šrámek s’intéresse à une forme particulière d’espèce menacée : celle constituée par les projets architecturaux et urbains du milieu des années 1950 à la fin des années 1980, en particulier ceux produits par les cabinets publics architectes et d’ingénieurs des pays dits « socialistes » tels que l’ancienne Tchécoslovaquie. Terrain de jeu privilégié des avants gardes architecturales de la première moitié du 20e siècle – Cubisme, rondocubisme, Bauhaus, fonctionnalisme… les pays tchèques ont vu l’édification de nombre de projets de premier plan, tels que ceux d’Adolf Loos à Prague ou Pilsen, ou la villa Tugendhat de Mies van der Rohe à Brno. En revanche, les projets postérieurs à la brève période du réalisme socialiste, qui ont reconfiguré les villes à l’ère du socialisme « réel » et normalisé, sont généralement déconsidères, associés à l’usage immodéré de la préfabrication, et à une monumentalité qui brutalise le tissu urbain antérieur. Dans les conditions du capitalisme de marché, ces bâtiments et espaces à usage public ou collectif (hôtels, lieux de culture, sièges d’entreprises publiques…), dépourvus de protection au titre de leur valeur patrimoniale ont donc été exposés à un processus de disparition accélérée.
Or, pour Jan Šrámek comme nombre d’activistes de sa génération, ce paysage urbain est non seulement la trame de fonde de l’existence d’une majorité de citoyen.e.s, mais aussi porteur de principes d’actualité, tels que la place conférée aux espaces communs, une qualité ornementale accessible à tous ou la nécessaire ambition architecturale des projets à usage du public. À l’heure ou le New European Bauhaus revendique une (re)construction durable à travers la conversion ou l’adaptation des bâtiments de la seconde moitié du 20e siècle plutôt que leur éradication, l’activisme graphique de Jan Šrámek à la fois ludique et légèrement dystopique, suscite un lien émotionnel et empathique avec ce patrimoine brutaliste et moderniste « non reclamé ». Ses dessins à plat, aux teintes légèrement passées, composent des scènes du quotidien qui rendent vie à ces complexes de béton, d’acier et de verre. Surdimensionnés, ces édifices qui comptaient avec un avenir radieux, sont aujourd’hui démantelés ou remodelés perdant peu à peu leur essence et cédant leur place à une autre forme d’architecture standardisée, dictée par la rentabilisation du bâti à des fins spéculatives.
En s’adressant aussi bien aux maîtres d’œuvres des projets de reconstruction qu’aux pouvoirs publics et à toutes les catégories d’usagers de la ville (enfants, adolescents, familles, personnes âgées, minorités…), ce travail prône une approche inclusive de la ville, tout en restituant la richesse, la sophistication et l’impact durable de ces bâtiments et lieux en voie d’extinction dans l’espace urbain et l’imaginaire de plusieurs générations.
Photographies Sarah B / BestArchiDesign
A propos de l’artiste Jan Šrámek
Jan Šrámek est artiste visuel, illustrateur et enseignant tchèque. Il est diplômé de la Faculté des Beaux-Arts de l’Université Polytechnique de Brno, où il dirige actuellement le studio « Vidéo » aux côtés de Martin Mazanec. Il collabore souvent avec l’artiste Veronika Vlková. Jan Šrámek est un artiste à succès fréquemment mentionné ces dernières années dans le domaine de l’illustration de livres.
Illustrateur et co-auteur des publications suivantes :
Pokrok nezastavíš, čéče! (Tu ne peux pas arrêter le progrès, mec !, 2023), Jak si užít film (Enjoying Film, 2022), Apolenka z modrotisku (2020), Apolenka z modrotisku (L’atelier bleu d’Apolline ; 2020), To je metro, čéče ! (C’est Metro, mec !, 2019), Pražské vize (Prague Visions, 2017), Zvláštní okolnosti (Circonstances spéciales, 2016), Pionýři a Roboti (Pionniers et robots, 2016).
Son travail a été présenté dans des galeries et des festivals du monde entier, notamment à Londres, New York, Amsterdam, Séoul et Pékin.
En 2014, il est co-créateur du pavillon tchéco-slovaque de la Biennale d’architecture de Venise.
En 2017 et 2020, il a remporté le prix Czech Grand Design dans la catégorie Illustrateur de l’année.
Ses illustrations pour le livre To je metro, čéče ! ont été sélectionnés pour une exposition prestigieuse au Salon du livre jeunesse de Bologne en 2020.
★ Exposition Jan Šrámek « Endangered Species » Unclaimed brutalism heritage 1958 – 1989
⚑ ADRESSE : Unité d’Habitation Le Corbusier, 280 Boulevard Michelet, 13008 Marseille
⚑ LIENS : jansramek.art – Kolektiv Cité Radieuse – Favu Brno
⚑ INFOS : Du 06 avril au 15 mai 2024, de 10h30 à 18h00. Fermé lundi, mardi et dimanche